Une jeunesse totalement déconnectée des enjeux politiques et sociétaux (analyse de l'abstention)

Abstention des jeunes : Une jeunesse totalement déconnectée des enjeux politiques et sociétaux #14


En France, les périodes électorales se succèdent et semblent malheureusement se ressembler. Quoiqu’il se produise, c’est toujours le même constat qui est fait. L’abstention des jeunes atteint constamment des niveaux « records » lors des diverses élections. Qu’elles soient présidentielles, régionales, départementales, municipales, et législatives, rien ne change et cette situation croissante devient de plus en plus préoccupante, au fur et à mesure des années. Que se passe-t-il ? Comment en est-on arrivé à une jeunesse déconnectée des enjeux politiques du pays ? Est-ce normal ? Pourquoi les jeunes ne votent pas ? Doit-on s’accoutumer à cela ? Que doit-on faire ? Les jeunes sont-ils fautifs ?

Sommaire

I. Cosmogonie de l’arrivée d’Emmanuel Macron en 2017
II. Pourquoi l’abstention n’a aucun intérêt ? 
III. Une jeunesse peu informée et concentrée sur les futilités


Cosmogonie de l’arrivée d’Emmanuel Macron en 2017

Le paysage politique français est complètement éclaté depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017. Le Parti socialiste et les Républicains ont pendant de longues décennies été les partis politiques qui polarisaient le paysage politique français. On retrouvait notamment Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Fillon pour l’UMP devenu Les Républicains (LR) en 2015, et François Mitterrand, Ségolène Royal, François Hollande du côté du Parti Socialiste (PS). 

Emmanuel Macron, avec son mouvement La République en Marche (LREM) a absolument bouleversé la classe politique française. Suite à son arrivée de très nombreuses défections ont été constatées du côté du PS et du côté de LR pour rejoindre par opportunisme le parti du candidat victorieux. D’ailleurs, les conséquences de ce chantier se sont ressenties dans les urnes lors des élections présidentielles de 2022, puisque Anne Hidalgo, la candidate du Parti Socialiste, n’a recueilli que 1.75 % des suffrages pendant que Valérie Pécresse de Les Républicains n’en a recueilli que 4.78 %. Des scores d’une bassesse historique pour ces partis politiques.

En 2017, de multiples électeurs dont beaucoup de jeunes se sont fait séduire par la jeunesse de Macron. Le candidat Macron promettait de bouleverser le paysage politique français, il promettait également plus de parité, plus de jeunesse dans les représentants des institutions. Ce qui faisait que dans un monde dans lequel la plupart des gens étaient des hommes, âgés entre 50 et 70 ans, il incarnait à 39 ans cet espoir de renouvellement de la classe politique que de maints français attendaient. Pour ma part, même si j’étais en terminale à cette époque et que je n’avais que 18 ans, je ne me suis jamais fait bercer par ses fariboles. 

D’ailleurs, une fois élu, il nous a montré son vrai visage et cet individu qui était censé représenter un nouveau souffle pour la jeunesse s’est avéré être en réalité un usurpateur. Ce sont en vérité les mêmes personnes qui tiennent les rênes du pays. Seul l’étendard français a été visuellement rajeuni.

La politique d’Emmanuel Macron ne prend pas en considération les problématiques de la jeunesse, et je ne vais même pas entrer sur le terrain de l’écologie ou de la justice sociale d’un personnage comme Jean-Luc Mélenchon. Depuis son arrivée au pouvoir en mai 2017, les étudiants souffrent, les enseignants des écoles, des collèges et des lycées souffrent, les élèves souffrent de toutes les réformes annuelles de Blanquer qui créent une instabilité de l’enseignement dans le secondaire et du baccalauréat. Sans parler de la calamiteuse gestion de la crise sanitaire dans les écoles, et de l’absence relative de ministre de l’Enseignement supérieur depuis bientôt un peu plus de cinq ans. 

Pour toutes ces raisons évoquées plus haut, je peux comprendre que les jeunes ne se sentent pas ou plus concernées par les enjeux politiques en France. Notamment en raison du manque de considération de leurs problématiques et du manque confiance qu’ils vouent envers les institutions et envers les gouvernants. Néanmoins, ce n’est pas la bonne manière d’agir. 

Pourquoi l’abstention n’a aucun intérêt ? 

Vous ne souhaitez plus voter car vous pensez qu’en ne le faisant pas nos dirigeants vont par bienveillance prendre conscience de la situation et vont changer les choses pour s’adapter à vos revendications ? Vous faites fausse route. Jamais, dans l’histoire, ça ne fut le cas, et jamais ça ne le sera. Et en plus, cela a encore moins de chance de se passer dans un pays comme la France. Dans l’histoire, les peuples se sont toujours battus pour obtenir leurs droits et leurs libertés, mais il n’y a qu’à notre époque que les gens pensent que ça leur est dû. En France, le type de scrutin majoritaire fait que ce sont les électeurs majoritaires parmi ceux qui se sont exprimés qui ont raison. Les absents ont donc ainsi tout simplement tort. Non seulement, ils s’auto-excluent en ne participant pas à la vie politique du pays, mais ils subissent également les choix politiques de la majorité parmi les votants. 

D’ailleurs, je vais peut-être vous apprendre quelque chose. Mais il faut savoir qu’en France, lorsque l’on fait l’analyse sociologique des votes lors des différentes élections, on remarque que la profession et les revenus ont une incidence sur le taux de participation aux élections élevé. C’est un fait. Les personnes qui gagnent le moins bien leur vie sont les plus grands abstentionnistes. Donc vous subissez les coûts de la vie, mais vous subissez aussi les politiques mises en place pour favoriser les riches et un système déjà bien établi. Le suffrage censitaire est révolu depuis 1848, mais dans les faits, il perdure toujours. Beaucoup trop de personnes se plaignent de Macron en disant qu’il est le président des riches, mais lorsqu’on s’aperçoit qu’il y a eu 25 % d’abstention au second tour des présidentielles de 2017 et 60 % d’abstention au second tour des législatives de 2017, comment peut-on encore oser se plaindre de la situation, quand une minorité par votre faute a réussi à détenir légalement le pouvoir parce que vous avez renoncé à faire entendre votre voix, à la manière dont le système le souhaitait ? 

Chez les jeunes, le constat est sans appel. C’est encore pire comme en témoigne le tableau ci-dessous : 

Synthèse des taux d’abstention chez les 18-24 ans lors des élections présidentielles et aux législatives de 2017 et de 2022
Synthèse des taux d’abstention chez les 18-24 ans lors des élections présidentielles et aux législatives de 2017 et de 2022

Une jeunesse peu informée et concentrée sur les futilités

À mon humble avis, je trouve que beaucoup trop de jeunes ont des intérêts dans des choses futiles. Effectivement, nous vivons à une époque où Internet et les réseaux sociaux représentent tout pour les gens. Au lieu de s’intéresser aux situations concrètes de la vie réelle qui sont pourtant des situations qui nous touchent tous, les jeunes sont plutôt intéressés par suivre les péripéties de leur tiktokeur/tiktokeuse préféré, par suivre la vie de leur influenceur ou star préféré. Ou encore, à regarder la vie des gens (télé-réalité, VLOG, etc), et à regarder toujours plus de séries ou de films qui leur permettent de s’évader et de fuir un monde dans lequel ils sont pourtant physiquement ancrés. Nous sommes tombés dans le règne du divertissement à outrance. On vit à une ère dans laquelle les gens vivent de plus en plus dans un monde électronique et virtuel, et ça n’a l’air d’étonner personne. La société s’individualise. Les gens sont complètement indifférents aux situations des autres. Si ça ne nous touche pas, on ne se sent pas concerné. On est passé d’une société communautaire et fraternelle plaçant la nation au centre de tous les rapports humains, à un groupement individuel d’individus cohabitant les uns à côté des autres.

Pour moi, ce nouveau comportement peut expliquer le désintérêt de la jeunesse dans l’engagement politique vu que le sentiment national n’existe quasiment plus. Les jeunes doivent aussi comprendre que la politique, ce n’est pas seulement faire un choix entre tel ou untel en étant passif. On peut aussi être actif, si les choix proposés ne nous satisfont pas, nous avons toujours la possibilité de créer nos mouvements, afin de mobiliser et d’impliquer davantage les jeunes pour éradiquer cette abstention qui joue en notre défaveur.

Enfin, l’une des raisons qui permet d’expliquer ce désintérêt de la jeunesse, c’est le manque de connaissance du sujet. En effet, peu de jeunes savent la manière dont les institutions françaises fonctionnent, ce qui accroît les taux d’abstention avec le temps, en même temps que la défiance envers les politiques augmente. Si seulement l’école en faisant plus, en ajoutant plus d’heures d’éducation civique et morale en primaire, collège et lycée. Une heure par semaine toutes les deux semaines ou tous les mois, ce n’est pas suffisant… En plus, ces cours assez concrets étaient très appréciés par les élèves quand j’étais au lycée.

Ces cours ne sont pas du tout assez exploités dans le système éducatif actuel. C’est pourquoi de nombreuses personnes n’ayant par exemple pas suivi d’option science politique au lycée ou n’étant pas allé en licence de droit à l’université, ne connaissent pas grand-chose du fonctionnement de la Ve République et de ses institutions. Des connaissances qui se limitent bien trop souvent à ce que nous montre les médias (quand ils jouent leur rôle) et les réseaux sociaux (machines à propagande aisément utilisées par les extrêmes).

Le système éducatif passe son temps à développer le côté académique des élèves pendant que le caractère social de ce dernier en société est complètement mis de côté. Privant ainsi les élèves de toute intelligence sociale à cause de méthodes et pratiques usinières, dignes de chaînes de production de l’époque fordisme.

Dans ces conditions, comment la gauche peut-elle militer pour accorder le droit de vote aux jeunes de 16-18 ans quand on sait qu’entre 1/2 et 2/3 des 18-34 ans boudent les urnes. Ça n’a aucun sens !

A.M

Vous avez beau ne pas vous occuper de la politique, la politique s’occupe de vous tout de même.

Comte de Montalembert (1810-1870), Discours, entretiens et autres sources

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